Fuite des cerveaux | Un problème complexe aux causes multiples

 

Bien que les chiffres exacts varient, plusieurs rapports indiquent qu’une proportion significative de diplômés, en particulier dans les domaines des sciences, de la technologie, et de la santé, envisagent de quitter le pays pour de meilleures opportunités. Cette hémorragie de compétences est particulièrement inquiétante pour une nation qui aspire à devenir un hub de développement technologique et économique en Afrique.

«La fuite des cerveaux parmi les ingénieurs en Tunisie : causes, conséquences et propositions de politiques économiques», un travail publié par l’Institut tunisien des études stratégiques (Ites), début juillet 2024, montre que le taux de l’émigration parmi les ingénieurs tunisiens est alarmant. Ce fléau impacte durement le développement économique et social du pays. Il touche, à la fois, la pérennité de son modèle économique et sa compétitivité internationale ainsi que sa capacité à réussir ses transitions énergétique, numérique et écologique. Selon des statistiques récentes, près de 60 % des diplômés tunisiens envisagent de s’installer à l’étranger. Ces départs multidisciplinaires s’opèrent dans des filières stratégiques pour le pays. Cette tendance soulève des questions sur la capacité de la Tunisie à retenir ses talents, et les conséquences sont déjà visibles dans de nombreux secteurs, comme la santé et l’éducation.

Les conséquences sont lourdes

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La fuite des cerveaux en Tunisie n’est pas un phénomène nouveau, mais elle s’est intensifiée après la révolution de 2011, en raison de l’instabilité économique et politique. D’après des études récentes, près de 95.000 Tunisiens, majoritairement des profils hautement qualifiés, ont quitté le pays entre 2011 et 2021. Le secteur médical est particulièrement touché : plus de 4.000 médecins ont émigré vers l’Europe et le Moyen-Orient au cours des dix dernières années. Cette tendance continue de croître avec de jeunes talents dans les secteurs des technologies de l’information, des sciences et des services qui cherchent à s’expatrier.A croire les chiffres publiés dans un rapport de l’Organisation de coopération et de développement économique (Ocde), cette émigration touche particulièrement les jeunes diplômés, dont 27 % envisagent une expatriation dans les cinq ans suivant l’obtention de leur diplôme. 84 % parmi eux sont parties principalement vers Europe. Les raisons de cette hémorragie sont multiples. D’un côté, la dégradation des conditions de travail, la faible rémunération et l’instabilité politique créent un climat d’incertitude pour les jeunes diplômés et les professionnels qualifiés. De l’autre côté, les pays d’accueil comme la France, le Canada ou encore l’Allemagne mettent en place des politiques d’immigration attractives pour attirer cette main-d’œuvre qualifiée. Ces destinations offrent de meilleures perspectives de carrière, un environnement professionnel stable et des opportunités de progression qui séduisent de plus en plus de Tunisiens. La fuite des cerveaux a un impact significatif sur le développement de la Tunisie.

En perdant des compétences clés, le pays se retrouve privé de talents capables de contribuer à son essor technologique, scientifique et économique. Dans le secteur de la santé, le départ massif des médecins crée des pénuries dans certaines spécialités médicales, surtout dans les régions intérieures, ce qui entraîne une dégradation de la qualité des soins offerts à la population.Sur le plan économique, la fuite des cerveaux empêche la création d’un écosystème de recherche et d’innovation robuste, essentiel pour la compétitivité du pays à l’échelle internationale. Les investissements en éducation et en formation réalisés par l’Etat ne bénéficient pas à la Tunisie à long terme, car ces diplômés finissent par renforcer les économies des pays étrangers.

Comment inverser la tendance ?

La fuite des cerveaux en Tunisie est un problème complexe, mais il est possible de la réduire à travers des mesures concrètes et ambitieuses.

Face à cette situation préoccupante, l’Etat tunisien doit entreprendre plusieurs actions pour contrer ce phénomène. D’abord, il est impératif que les autorités tunisiennes mettent en place des politiques pour améliorer les conditions de travail des professionnels qualifiés. Cela inclut des salaires plus compétitifs, de meilleures infrastructures et un environnement de travail plus respectueux et motivant. Des réformes dans le secteur de la santé, de l’éducation et des technologies de l’information sont particulièrement cruciales.

Ensuite, il est nécessaire d’encourager les jeunes talents à créer leurs propres entreprises en Tunisie, une solution durable pour retenir les compétences, et ce, à travers des incitations fiscales. Enfin, des programmes de soutien financier et des initiatives de mentorat peuvent aider à transformer l’économie tunisienne en un hub d’innovation, offrant des opportunités de développement aux diplômés.

En créant un environnement favorable à la croissance des talents locaux et en valorisant les compétences de la diaspora, la Tunisie peut espérer inverser la tendance et tirer parti de ses ressources humaines pour stimuler son développement économique.

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